Réflexions et constats pour aborder l'autisme autrement: Régine CASTAING
Par Régine Castaing, psychologue clinicienne, formatrice agréée
En ma qualité de psychologue clinicienne partageant les théorisations du professeur GOLSE et de la CIPPA, pour avoir été formée au packing par Pierre DELION et actuellement en ma position de formatrice en hôpitaux de jour et autres structures médico-sociales, je me sens dans l'obligation de faire part de quelques réflexions de terrain et de dénoncer un certain nombre de contre-vérités que je n'ai encore jamais lues ou entendues dans aucun des medias.
Nous avons été ces temps-ci, abreuvés d'information, de "bonnes et mauvaises pratiques", d'intoxication médiatique, écœurés par la mise à l'index, par les adeptes du comportementalisme, de personnes pourtant reconnues comme praticiens de grande humanité. Certes, nous n'avons que trop peu communiqué sur notre travail et sur les évolutions positives obtenues avec ces enfants, que nos adversaires denient.
Nous sommes pourtant nombreux parmi les gens de terrain (psychiatres, psychologues, psychomotriciens, infirmiers, éducateurs, orthophonistes, formateurs...), travaillant dans les hôpitaux de jour et autres structures soignantes médico-sociales (IME et IMP) à être confrontés à des jeunes de tous âges, présentant des troubles autistiques et /ou envahissants du développement appelés TED et à utiliser les outils psychanalytiques. Ces professionnels font, pour la plupart, un travail de grande qualité où le souci, l'écoute, l'inventivité thérapeutique dominent et ce, en silence, parfois dans le découragement car ils sont, depuis quelque temps aussi, plutôt malmenés par les nouvelles directions. Ils se sentent humiliés par les propos véhiculés par le courant comportementaliste, particulièrement actif, bruyant et attirant plus les medias que les "tâcherons" de terrain.
Cependant, je ne cautionne pas davantage certaines pratiques de certaines écoles freudiennes, minoritaires dans ma région, dans lesquelles je ne me reconnais pas et qui ont, à leur manière, exercé une forme de dictature du langage et de la pensée, complètement déconnectées de la réalité des jeunes patients autistes et qui ne se sont pas ouverts à de nouvelles pratiques ni même à des outils cognitifs très précieux qui sont employés maintenant dans les structures de soin.
J'aimerais donc mettre en évidence un certain nombre de contre-vérités qui se veulent généralistes et qui heurtent même les esprits épris de logique et de science.
1/ Slogans d'arrière-garde et amalgame psychanalytique
Depuis longtemps, les détracteurs ont dénoncé les pratiques utilisées par Bruno BETTELHEIM (années 70) et ses adeptes. Certes, il en existe encore en France. Nous sommes nombreux à penser qu'elles ne sont plus adaptées à l'heure actuelle car elles ne prennent pas en compte de nombreux autres facteurs dont l'ancrage corporel, indispensables à la relance des investissements psychiques et relationnels des enfants autistes.
En revanche, rien n'est dit sur d'autres courants de pensée qui travaillent depuis longtemps (1985) en collaboration avec le monde de la science, dans le cadre de l'INSERM. Psychiatres, psychologues, psychanalystes réfléchissent avec des collègues scientifiques neurophysiologistes, biologistes chercheurs, généticiens, etc... et croisent leurs approches. Ce courant de pensée continue à affirmer, avec de nombreux autres scientifiques, que notre psychisme se construit et que notre base neurologique sera modelée, complexifiée par toutes les rencontres heureuses ou désastreuses de l'existence. Cette approche psychodynamique du développement et de la construction psychique est portée par le Professeur B. GOLSE - complètement ridiculisé dans le trop fameux documentaire Le Mur, interdit depuis le 26 janvier - et de nombreux autres éminents confrères.
Nous sommes nombreux à avoir été formés à la technique du "packing" auprès du Professeur P. DELION (approche corporelle spécifique d'enveloppements humides et froids). Nous avons toujours pratiqué cette technique avec quelques enfants en très grande difficulté, notamment automutilateurs, dans les conditions qui nous avaient été enseignées, en accord avec le médecin responsable de l'établissement et seulement après entretien avec la famille et avec son accord, comme cela s'est pratiqué dans les structures que nous connaissons et qui avaient opté pour ce soin.
Je peux vous assurer qu'au lieu de la "barbarie" affirmée par ses détracteurs, ce sont les seuls moments où nous avons pu recueillir l'éveil et l'apaisement de la plupart d'entre eux, ce qui nous semblait impossible auparavant, notamment chez des enfants qui ne s'adressaient que des coups, de jour comme de nuit. Ce sont les seuls moments où ils nous ont exprimé des émotions positives, retrouvé le calme du corps et communiqué sans mots avec leurs gestes, leurs mouvements, réclamant le massage de telle partie du corps négligée auparavant ou inexistante ou se refaisant eux-mêmes un pack après les séances, cocon protecteur et bienfaisant. Et puis, cela nous fut interdit (dès 2003, dans ma structure) et ce soin ne put être poursuivi, le travail de sape de ses détracteurs ignorants avait déjà fait son œuvre. Actuellement, peu de structures osent encore le pratiquer du fait de la pression, du terrorisme qu'ils exercent et de l'écoute qu'ils obtiennent dans les sphères autorisées malgré les préconisations officielles de la Haute Autorité de Santé en 2010. Le voilà maintenant interdit depuis le 6 mars dernier .
Alors je suis triste pour ces enfants qu'on a été obligé de laisser sur la route...
2/ Le confusionnisme issu de l'amalgame "cognitivo-comportemental".
Le Professeur Gérald M. EDELMAN, (Prix Nobel de Physiologie et de Médecine, Directeur du "Neurosciences Institute", LA JOLLA en Californie), nous éclaire, dans Biologie de la conscience (1), sur l'incongruité de l'assemblage cognitivisme et comportementalisme, le second, par essence, niant totalement le premier. Nombreux sont les scientifiques de haut niveau, y compris en France, qui envisagent, heureusement encore, l'individu dans sa globalité (ressentis, pensées, comportement). Or il semble que ces détracteurs ne veulent (ou ne peuvent) rien entendre de la souffrance intérieure de ces enfants pourtant bien connue, décrite par des autistes eux-mêmes, et théorisée depuis un demi-siècle par l'école psychanalytique post-kleinienne anglaise et française.
3/ La méthode par conditonnement
Beaucoup d'entre nous refusent certaines méthodes préconisées, notamment la méthode ABA ("Applied Behavior Analysis"), car cette méthode choque notre éthique. Nous ne pouvons qu'être circonspects sur ces techniques très "valorisées", censées "formater" l'enfant autiste à de bonnes pratiques, qui agissent par conditionnement purement pavlovien à un stimulus, entraînant une adaptation progressive du sujet aux réponses qui doivent être conformes à celles attendues. Elles orientent le comportement du sujet dans le sens que l'on souhaite obtenir par gratification positive ou négative sanctionnant le bon ou le mauvais comportement. Ce qui est gênant, c'est qu'il n'y a aucune place dans ce protocole pour la prise de conscience, l'écoute des angoisses et encore moins le désir de l'enfant.
Or, il est bon de savoir que deux associations d'adultes autistes se sont constituées en Amérique pour dénoncer la maltraitance physique et psychique subie quand ils étaient enfants, soumis à la méthode ABA. Michèle DAWSON en fait part dans un livre fort instructif.
Il faut savoir aussi que les résultats montrés par l'étude sur ABA (LOVAAS) sont très en deça de ceux prônés par leurs adeptes.
Passons donc aux abus et dérives diverses;
1/ Le premier abus porte sur les déclarations mensongères des comportementalistes qui se targuent de la scientificité de leurs techniques. Ces approches sont "prouvées scientifiquement contrairement aux techniques psychanalytiques", clament-ils en tous lieux. Quelques exemples vont vous montrer ce qu'il en est vraiment.
— la méthode ABA (EIBI en anglais) a bien sûr fait l'objet d'études par son auteur (LOVAAS et son équipe). Il a été démontré que déjà leurs résultats sont contestables à plus d'un titre sur le plan de la rigueur tant intellectuelle que scientifique (cf étude détaillée de V. SHEA (2). Elle ne s'est révélée intéressante que pour un très petit nombre d'enfants, à savoir: 47% de réussite, sur un échantillon de 19 enfants (9/19). LOVAAS entend par réussite le retour au développement normal (scolarisation sans aide spécifique).
Il est très important de savoir qu'ont été exclus de l'étude préalable les enfants présentant, parce que non performants ou s'étant détériorés :
- des troubles envahissants du développement mais avec retard mental,
- ceux avec des TED non spécifiés et
- ceux atteints du syndrome de Rett.
En fait, ces résultats (relatifs) font le constat d'une application restrictive de la méthode aux seuls autistes de haut niveau. Or, dans nos structures de soin, heureusement nous ne faisons pas le tri entre les "bons" sujets et les autres et les syndromes d'Asperger sont rares ! LOVAAS lui-même écrit en 2002: «Nous estimons que les résultats de retour au développement normal obtenu par l'application de la méthode dans ces conditions, si le traitement est complet (intensif) et véritablement administré, seraient inférieurs à 10%»
D'ailleurs, nous en voyons de plus en plus les réactions négatives lorsque les enfants sont confrontés, malgré eux, aux méthodes psychanalytique et comportementale: désinvestissement des lieux et des soignants qu'ils affectionnaient, reprise des conduites de retrait abandonnées par l'enfant, arrêt de l'éveil psychique, réactions somatiques de grande ampleur sans cause réelle diagnostiquée, décompensation psychique, etc... Nous les comprenons comme une impossibilité de l'enfant d'assimiler deux demandes antinomiques et paradoxales (mécanisme de double-lien ou choix impossible). La méthode ABA est mise en place par les parents hors institution et souvent sans aucune concertation avec les responsables médicaux. Or, son fondateur LOVAAS lui-même a très clairement défini sa méthode comme inopérante et même dangereuse pour certains types de pathologie, et les a exclus de ses résultats pour ces raisons.
— Une étude anglaise (BIBBY 2002), portant, au départ, sur 66 enfants de 45 mois en moyenne (64 autistes ou à spectre autistique et 2 diagnotiqués avec TED) suivis par la méthode ABA "gérée par les parents" et non par des professionnels comme la précédente étude, montre qu'«aucun des enfants âgés de plus de 72 mois n'était intégré à l'école publique sans être accompagné individuellement par un adulte». Autrement dit, aucun enfant n'avait atteint le "stade du développement normal scolaire" sans aide d'un adulte. Le pourcentage d'enfants ayant le mieux évolué à l'issue du traitement ABA, 12 mois plus tard, s'avère être de 3/48 soit 6% (V. SHEA).
— Passons maintenant à cette fameuse "méthode de DENVER" dont se réclame le député FASQUELLE et qui voudrait la faire appliquer entre autres, à tous les petits Français présentant des TED, pour remplacer les traitements psychanalytiques "non évalués".
Il suffit de se reporter à l'étude faite pour le gouvernement du QUEBEC par des scientifiques de renom (Eric FOMBONNE) et, semble-t-il, honnêtes. Il s'agit d'une méthode qui améliorerait les habiletés sensori-motrices des jeunes autistes, favorisant ainsi l'indépendance dans les activités de la vie quotidienne des enfants avec trouble envahissant du développement, mais qui devrait aussi améliorer le processus de traitement de l'information chez ces enfants que l'on sait très particulier et très entravé. Traitement sur 24 mois et concerant 36 enfants. Aucune des hypothèses ne se trouve confirmée à la fin de l'étude. Je vous cite une partie du rapport: «Si l'on tient compte de toutes les évaluations faites, on observe plutôt une diminution des scores moyens de groupe indiquant une aggravation des symptômes sensoriels. De plus, les réactions sensorielles atypiques ne semblent pas s'améliorer dans le temps... Seules la sensibilité orale et la recherche de sensation semblent plus stables dans le temps... En somme, une grande variation existe entre les enfants sur le plan sensoriel, certains s'améliorent, d'autres présentent plus de difficultés.... Ainsi, les réactions sensorielles atypiques demeurent préoccupantes pour l'ensemble du groupe à 6 ans et ne sont pas améliorées dans l'intervalle de 2 ans.» (p.12) . Puis plus loin (p.15) «en somme, l'autonomie personnelle des enfants ayant un trouble du spectre autistique demeure très limitée avec un quotient de 2 écarts-types sous la moyenne.
Sur la base des mesures des comportements adaptatifs rapportés par les parents avec le VABS-2, les enfants ont progressé dans leurs soins personnels, leurs habiletés domestiques et communautaires et en motricité fine et globale. Lorsque comparés avec les normes du test, les enfants ont des performances stables pour lesquelles peu de différences significatives sont notées. Seule la communication s'est améliorée significativement alors que la motricité globale s'est détériorée de manière significative» .
Ce monsieur a-t-il vraiment lu le rapport ou est–il si mal conseillé ? Doit-on accorder du crédit à cette méthode évaluée avec de tels résultats? Combien de couleuvres nous fera-t-on avaler? Que l'on ne se laisse pas abuser! Si certains y croient malgré tout, laissons-leur cette liberté mais n'engageons pas l'Etat dans des dépenses en pure perte car nos psychomotriciens sont bien plus efficaces quoi qu'en pensent nos détracteurs !
— Quant aux autres études scientifiques, elles sont nombreuses mais disparates, totalement parcellaires et ne peuvent en aucun cas être généralisées, contrairement à ce qui est dit. Leurs partisans qui brandissent les résultats de ces recherches scientifiques (petite guerre, d'ailleurs, entre généticiens, biologistes, biochimistes, neurophysiologistes et autres) font croire au public, via les medias, que la source de l'autisme est trouvée. Un exemple, parmi tant d'autres: la recherche de Monica ZILBOVICIUS (2004), très intéressante par ailleurs, a été titrée, dans le communiqué officiel de l'INSERM, «Le cerveau des autistes hermétique à la voix humaine». Or l'étude ne porte que sur 5 adultes avec autisme dont 3 n'avaient pas identifié la voix humaine. Sa généralisation est donc pour le moins prématurée. Et il en est ainsi de nombreuses approches scientifiques sur l'autisme qu'on fait passer pour universelles (dans les congrès, cet élément chiffré, pourtant capital pour rendre crédible la recherche, n'est jamais donné, c'est assez ahurissant !).
2/ Deuxième abus découlant de ce qui précède : tous ces esprits jetant l'anathème, ont, semble-t-il, en commun une dose plus ou moins grande de malhonnêteté intellectuelle que l'on retrouve dans leurs discours, leurs écrits.
Pour être clair, il n'y a pour l'instant en France aucune étude achevée en randomisation (c'est-à-dire de grande envergure) pouvant faire état de la superiorité d'une pratique sur l'autre, qu'elle soit d'ordre cognitiviste, comportementaliste, médicamenteuse ou psychanalytique.
Ce travail est en cours mais pas encore abouti, car c'est un travail considérable qui s'étend sur plusieurs années pour pouvoir faire état de l'évolution des sujets. Donc les parents sont leurrés en permanence et s'accrochent bien entendu à la parole du bonimenteur.
Deux évaluations, à ma connaissance, sont en cours: la première est organisée par les Centres de Recherche sur l'Autisme (CRA), organisme officiel, pour évaluer différents facteurs (traitements médicamenteux, approche cognitive, approche comportementaliste, Thérapies Cognitivo-Comportementalistes, approche éducative, etc...)
La deuxième, organisée par la CIPPA (Coordination Internationale entre Psychothérapeutes psychanalystes s'occupant de Personnes avec Autisme) mixe les échelles d'évaluation communes aux deux recherches (BARTHELEMY/ECART-T/VINELAND/CONNERS...) et la grille d'évaluation psychodynamique mise en place par le réseau INSERM Autisme dont le docteur G. HAAG est à l'origine.
Toutes les deux s'effectuent sur 3 à 5 ans d'évolution ou plus en suivi et ne sont pas encore achevées.
On pourrait y ajouter l'étude, plus spécifique, concernant les effets du "packing" mise en place dans de nombreux établissements hospitaliers.
Quant à toutes les autres études ou recherches scientifiques portant sur un nombre infime de sujets autistes, le plus souvent inférieur à 10, elles restent des pistes à valider. Donc, ceux qui se réclament de ces travaux scientifiques abusent les parents, l'opinion publique et les payeurs éventuels.
3/ Troisième abus et peut-être le plus grave: les méthodes utilisées par les détracteurs de la "psychanalyse" et leurs manœuvres.
Ceux-ci se dévoilent, se constituent en groupe de pression militant et vont de plus en plus loin dans leurs actions. En voici quelques exemples:
- Manifestation au Congrès National des Psychomotriciens- BIARRITZ Nov. 2011: ils avancent en groupe, masqués et refusent le dialogue qui leur est proposé par le président de l'Association;
- Intimidations sournoises des personnes qui travaillent ou réfléchissent sur l'autisme ("cartes de vœux" menaçantes envoyées en début d'année à un certain nombre de collègues);
- Plaintes déposées contre des professionnels. Le Professeur P. DELION et le Professeur COHEN ont comparu devant le Conseil de l'Ordre des Médecins, à LILLE, le 16 février dernier, pour pratique de "packing". Un groupe d'individus "packés" les attendait devant l'immeuble;
- Manipulation outrancière des discours à des fins de disqualification des pratiques et des personnes reconnue par le tribunal et sanctionnée par l'interdiction du film Le Mur depuis le 26 janvier, mais le commanditaire Autistes sans Frontières a fait appel et sa réalisatrice se répand sur le net et veut poursuivre son projet d'éradication de la "psychanalyse".
- Dernièrement, un anonyme fait passer sur Youtube une partie du documentaire tourné par "France 5" dans un hôpital de jour de ma région qui montre l'équipe en réflexion et l'approche du packing par une enfant. Les paroles d'accompagnement de l'enfant par les soignants sont occultées et l'on entend en off une voix féminine interprétant à sa manière ce qui se dit, ce qui se passe, puis l'image est coupée, et la voix laisse le spectateur, conditionné au préalable négativement, imaginer la suite.
Dérives perverses proprement scandaleuses car diffamatoires.
Ces procédés ne servent ni la liberté de pensée, ni la démocratie et rappellent des pratiques idéologiques d'un autre âge. Cela s'apparente à de la désinformation scientifique, politique et sectaire que l'on se doit de dénoncer haut et fort.
- Et ils montent jusqu'aux hautes sphères de l'Etat. La Haute Autorité de Santé avait inclus dans ses préconisations l'arrêt de tout traitement psychanalytique pour les enfants autistes. Je pense que l'intervention et la publication de certains éléments par le quotidien Libération a un peu freiné leurs ardeurs. Si les techniques psychanalytiques ne sont pas encore interdites et deviennent "non consensuelles", le packing, lui, est interdit dans le texte publié le 6 mars.
- Toujours plus loin, ils souhaitent faire une loi, portée par le député FASQUELLE, (UMP) pour interdire la psychanalyse dans les hôpitaux de jour, loi "humanicide" au sens d'esprit humaniste, cher encore à beaucoup d'entre nous. Dans quelle démocratie vivons-nous ? Il n'y a que dans les états fascistes ou fascisants qu'on détermine par des lois la façon de penser, de travailler des gens. Il nous semble que la dérive qui est à l'œuvre est suffisamment grave pour être portée à la connaissance de tous, et notament des élus, sans oublier les prises d'intérêt financier que l'on passe facilement sous silence. Le député en question ferait partie de la liste des députés compromis dans le lobby pharmaceutique. Il en est peut-être de même de quelques scientifiques, membres de l'AFIS dénoncés dans le Canard Enchaîné du 28 mars, et qui auraient pour tâche de s'attaquer à certains bastions ou idées reçues dont ferait partie la psychanalyse.
Position et pratiques réelles dans les hôpitaux de jour et structures médico-sociales
L'autisme , les TED nous renvoient, parents et soignants, souvent à l'impuissance et au désespoir, mais ce n'est pas en détruisant l'autre que nous règlerons le problème.
Notre objectif est simple et nous sommes nombreux à le défendre, il est pluriel et multifactoriel. Nous réclamons que le sujet autiste (TED) reste au centre de la préoccupation des soignants dans toutes ses facettes inhérentes à l'humain et dans une conscientisation permanente. Cela implique que les approches concernant les autistes soient adaptées à chacun et multiples, que tous les registres soient investigués et traités, du neuro-cognitif au génétique, du médicamenteux au psychanalytique sans oublier surtout l'approche corporelle dans laquelle devrait s'inscrire le packing (entre autres soins) si le sujet le nécessite. Les professionnels n'ont aucun compte à régler avec les parents de ces enfants mais en revanche, ils ont de l'empathie et de la compréhension et cherchent comme eux et avec eux à comprendre, expliciter encore et toujours.
Nos techniques sont beaucoup moins coûteuses et elles soignent humblement, jour après jour et sans ostentation. Nous pourrions vous citer des dizaines et des dizaines d'enfants qui ont quitté leur établissement, pas guéris parce que cela ne veut rien dire à l'heure actuelle, mais pouvant suivre une scolarité, ayant des investissements relationnels spontanés, exprimant leurs propres désirs, faisant leurs propres choix, tout simplement découvrant le monde et s'y inscrivant mieux. Ces évolutions nous en sommes heureux mais nous ne les clamons pas et personne ne semble les prendre en compte.
Et nous pouvons aussi vous parler de cas dramatiques, rares certes, mais dont on se remet difficilement en tant que soignant quand tous nos efforts sont restés vains ou encore de ces parents qui ne se remettront jamais du traumatisme subi.
Seuls s'expriment et ont un écho dans les médias, ceux qui sont fanatisés par leur souffrance, qui s'accrochent à un espoir de guérison totale utopique et univoque.
Ne croyez pas pour autant que nous soyions allergiques à toutes méthodes préconisées car certaines sont appliquées conjointement aux soins analytiques dans de nombreux établissements et ce de plus en plus. C'est le cas pour le PECS (Communication par échange d'images) ou le MAKATON dont nous constatons les bénéfices sur place et nous encourageons toutes les équipes à s'y former. Dans la mesure où cette technique (PECS) se cale sur le désir premier de l'enfant, il y a toujours possibilité de le dénicher si on prend la peine d'observer finement ces enfants, ce que les personnels savent très bien faire. C'est un outil cognitif de grande qualité, qui a été pensé pour structurer le temps et les représentations, pour établir des correspondances diverses entre objet réel et représentation imagée (photo, pictogrammes) et bien d'autres notions essentielles à la communication. Cet outil est donc tout-a-fait complémentaire de nos approches comme préalable à la communication.
Dans les structures hospitalières et médico-sociales, l'éventail des prises en charge est vraiment large, réel et donc multiforme (sans hiérarchie). Je vous les rappelle brièvement :
- les approches psychanalytiques sont diversifiées (groupe thérapeutique, approche individuelle, ateliers divers à médiateur), pensées en fonction de l'état et de l'intérêt de l'enfant: terre, musique, peinture ou traces, comptines, conte, psychodrame, construction, collages, danse... On y partage des émotions, on sollicite leur réflexion, on les aide à gérer leur violence, à réduire les angoisses qui leur sont propres, notamment les angoisses du regard, à sortir de leur enfermement et surtout ils apprennent à créer du lien de sens et des liens relationnels;
- des lieux spécifiques servent à la structuration de l'image du corps, pour les amener à passer de la sensation dans laquelle ils sont enfermés, à la représentation figurée, en passant par le travail d'équivalences corporelles du dedans/dehors, de l'enveloppement, de la tenue, de l'inscription de souvenirs partagés, etc...;
- la scolarisation, quand elle est devenue possible, les techniques éducatives (apprentissages, autonomie) et cognitives ne sont pas oubliées. Nombreux sont ceux qui utilisent le PECS qui apaise beaucoup les enfants qui en comprennent vite le sens et qui permet de mettre en place une vraie communication;
- l'accompagnement des parents dans ces épreuves qu'ils traversent reste un objectif indispensable et pensé comme intrinsèque au soin propre à l'enfant et n'a rien à voir avec le dessein de culpabilisation des parents qu'on veut lui coller et qui revient en boucle dans la bouche de nos détracteurs.
Il est probable que cette agitation frénétique et malveillante, ce remue-ménage médiatique tapageur, est en lien avec l'échéance du plan autisme 2012, année bénie où l'Etat distribuera des subsides.
Que vont devenir les structures accueillant ces enfants déjà étranglées par le manque de moyens en temps et en personnel et qui restent efficaces malgré tout?
Il faut surtout veiller à ce que les pratiques restent toujours au centre de l'humain et de son devenir et ne viennent pas satisfaire on ne sait quels intérêts peut-être moins louables. Les "chevaliers noirs" instrumentalisent la souffrance d'autrui pour attaquer un ennemi potentiel représenté par une entité, la psychanalyse, puis ses théoriciens et ses cliniciens, mais ils font fausse route et surtout se trompent de cible.
Je reste convaincue qu'une approche plurielle, multifactorielle, comme le requiert l'autisme, autour de la psychodynamique du développement basée sur la clinique psychanalytique, associée aux autres approches cognitivo-éducatives donne des résultats suffisamment étonnants pour être mentionnés et soutenus.
Ce travail est loin d'être exhaustif mais il se veut rigoureux. Cette cause me tient à cœur parce qu'il y a des visages d'enfants dans ma tête qui défilent et qu'on ne peut oublier même après des années. Il nous ont beaucoup appris et en particulier à être humbles et à revisiter sans cesse nos "certitudes" et nos pratiques.
Merci enfin pour l'attention que vous aurez portée à cet écrit et aux autistes à travers lui.
Fait à Bordeaux, le 10 avril 2012
Régine CASTAING
Psychologue clinicienne, Formatrice agréée
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(1) Gérald M. EDELMAN, Biologie de la Conscience, 2008, Editions Odile Jacob
(2) Victoria SHEA: article publié dans La Psychiatrie de l'enfant LII, 2009, p.273 à 299
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