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Plume ouverte : Atelier packing : Vous n'avez pas froid ? par MC Hiebel-Barat

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Plume ouverte :  Atelier packing : Vous n'avez pas froid ? par MC Hiebel-Barat

 
Ce qui vient faire critique d'emblée dans la pratique du packing, c'est la représentation que nous nous faisons nous-même, pour notre propre compte, de notre corps emprisonné dans des draps mouillés et froids. Cela peut paraître étrange et pas agréable du tout en effet.
D'une part, il ne s'agit absolumment pas de ça, seule la méconnaissance de ce qui se passe dans un atelier-packing peut permettre une telle critique réductrice, et d'autre part, c'est aussi pré-supposer, par ignorance toute ordinaire, que chaque être humain a une image de son corps qui serait la même pour tous.
La théorisation, l'élaboration théorique critique du travail clinique des équipes soignantes médicales et paramédicales auprès des personnes en souffrance nous apprend que dans la psychose et aussi dans une de ses formes premières qu'est l'autisme infantile, le corps est morcelé, le corps est dissocié, clivé.
L'enveloppement, comme dans des langes de nouveau-né, du corps entier, du haut du cou au dessous des pieds, permet d'offrir au corps de la personne une sorte de contenant de tissu humide et froid au départ, qui trace comme des bords, des limites sécurisantes, des contours, peut-être comme des retrouvailles avec l'intérieur du ventre maternel, univers liquide et contraint. Surtout tout cela se parle dans un lien, une présence, une interaction de paroles entre les professionnels et la personne.
Parfois l'emmaillotement est précédé de la pose sur chaque membre, un bras, puis l'autre, une jambe, puis l'autre, et enfin sur le torse, de serviettes de toilette humides. Cela permet de converser simplement par gestes et avec des mots quotidiens de l'unité du corps rassemblé, à partir de ce qui est le plus souvent vécu par la personne comme des "tout" distincts les uns des autres sans articulation et liaison entre eux.
L'évidence, pour nous, que le pied qui est au bout de notre jambe est notre pied, c'est à dire appartient au même corps que la jambe et que ce corps est le notre et pas celui du voisin, n'est pas une image du corps qui est là d'emblée acquise dans notre psychisme. Certes cela se passe comme ça dans la plupart des situations, au terme d'un processus de construction de notre image du corps dans notre psyché. Mais cela ne se construit pas de la même façon pour tous. Et ce processus ne "réussit" pas de la même façon pour tous.
En partageant avec la personne, qui souffre de morcellement de l'image du corps, l'expérience de l'enveloppement humide de son corps, quelque chose se passe dans le transfert qui lui offre un espace partagé de tranquillité, qui va favoriser la parole, ouvrir au dialogue et à l'émergence de fragments d'histoire qui se racontent.
Pendant la séance de temps en temps, nous nous assurons (nous nous rassurons...) : Vous êtes bien ? Oui. Vous n'avez pas froid ? Non, ça va.
Au début de l'atelier, au bout de 2 à 3 mn d'enveloppement nous demandons : vous vous réchauffez ? Oui. Aux pieds, aussi ? oui, partout.
Le temps de la séance, la personne parle avec nous, ou pas. Elle se tait, reste silencieuse, se met à chanter ou à raconter un souvenir passé, un événement de la journée. Sur un cahier, qui appartient nominativement et exclusivement à la personne, un de nous prend des notes, travail de scribe, travail d'inscription de ce qui se dit là. Recueil de la parole rendue possible. Reconnaissance de l'importance de la parole quand le corps agité, voire mutilé, cesse un temps de la lui couper !
A la fin de la séance, quand la personne le décide : vous voulez arrêter ? Oui. Ou non, je voudrais rester comme ça encore un peu.
Au moment du désenveloppement, quand nous approchons les mains pour prendre les différentes couches de tissu, et en les ouvrant découvrir la personne, la chaleur qui émane du corps est très perceptible et toujours très surprenante.
Ah ! Vous vous êtes bien réchauffé !
Et les serviettes posées sur les membres et le torse sont plus que tièdes ! C'est à ce moment-là justement qu'il ne s'agit pas pour la personne de prendre froid ! Elle passe un peignoir pendant que nous préparons une boisson chaude que nous partageons ensemble. Très important ce moment, il ne s'agit pas seulement de boire du chaud pour boire du chaud mais aussi par cette modalité entrer en contact avec l'intérieur du corps, ingérer à l'intérieur du corps un liquide chaud, descendre dans ce corps-là qui vient de passer un certain temps pris dans une enveloppe humide entourant sa surface extérieure.
Moment de convivialité aussi avant de prévoir ensemble quand aura lieu le prochain pack et avec qui, puis de se séparer.
Pour le dire à la façon parfois caricaturale du Professeur Delion, le packing, c'est pas miraculeux, c'est pas Lourdes ! Cela prend du temps.
Je connais plusieurs personnes qui lorsqu'elles allaient trop mal, venaient vers nous et demandait si on pouvait faire un pack avec elle.
Nous savions qu'il ne fallait pas remettre aux calendes grecques cette demande. Parce que l'angoisse dévastatrice allait s'amplifier ou prendre la forme d'une agressivité intense envers tout le monde.
Le personnes qui souffrent sont celles qui nous apprennent le mieux ce qui les aide. Soit elles peuvent le verbaliser, le dire avec des mots, soit elles l'expriment avec leur corps par des attitudes qui traduisent un apaisement, une tranquillité interne trouvée ou retrouvée.
S'agissant des personnes qui ont accepté que je fasse partie de leur équipe de pack, je les ai entendues et je les ai vues être vraiment mieux.
Souvent, ce mieux est précaire parce que la souffrance refait surface mais c'est aussi le cas malgré les autres prises en charge la prise de médicaments et des traitements lourds, malgré les séances de psychanalyse, malgré les nouveautés thérapeutiques comportementales et cognitivistes.
Restons tous humbles devant l'énigme des maladies psychiques qui accompagne l'homme comme existant. Tant mieux si la palette des propositions thérapeutiques s'élargit. Ne crachons pas sur la générosité et l'honnêteté de ceux qu'anime le souci thérapeutique de l'autre. Respectons-les, ne jetons pas le discrédit sur leurs pratiques en en disant n'importe quoi, parce que nous en ignorons tout. Pas de chasse aux sorcières, les personnes qui font des packs ne revendiquent aucun monopole. La technique des packs ne porte tort à personne et surtout pas aux enfants et aux adultes qui en bénéficient.
Ne nous laissons pas non plus berner ou leurrer par des intérêts spéculatifs idéologiques ou financiers qui nous prennent en otage de stratégies qui nous dépassent.
Il n'y a qu'une seule lutte à mener ensemble : soulager les hommes qui souffrent plus que d'autres, parfois beaucoup plus que d'autres, d'être hommes et cela peut parfois selon l'histoire de l'enfant commencer dès la naissance.


28/09/2012
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